Lefebvre des Noëttes

Originaire de Normandie, près de L’Aigle, cette famille acquiert la terre et le château des Nouettes au début du xviiie siècle, dont elle joindra le nom au sien. Elle rejoint la capitale bien avant l’ère des manufactures et y exerce le commerce du drap à l’enseigne Au prince de Conti, rue Saint-Honoré, en la paroisse Saint-Germain-l’Auxerrois, où les enfants Lefebvre des Noëttes sont baptisés. Sous le roi Louis XVI, Jean-Charles, « Conseiller du Roy, Controleur des rentes en l’Hôtel de Ville de Paris », appartient au Directoire de l’habillement des troupes, qui décide des uniformes des armées, de la qualité des draps et des couleurs des uniformes. Ses deux fils, Charles et Zénon, s’illustrent rapidement dans la carrière des armes et sont décorés sous l’Empire. Depuis, la famille se compose de très nombreux officiers aux xixe et xxe siècles, puis de médecins. Elle compte à chaque génération au moins un membre de la Légion d’honneur depuis la création de cet ordre.

Charles (1773 – 1822) est général de division, commandant de la Légion d’honneur, comte en 1808. Il charge sur tous les champs de bataille d’Europe comme général commandant les chasseurs à cheval de la Garde, et est pair de France aux Cent-Jours. Son nom est inscrit sur le pilier ouest de l’Arc de triomphe. Il épouse une petite-cousine de l’Empereur, qui lui donnera son hôtel de la rue Chantereine, d’où il était sorti le 18 brumaire. Il a une seule fille, Charlotte, dame d’honneur de l’impératrice Eugénie sous le nom de son époux, Lefébure de Sancy de Parabère.

Son frère cadet, Zénon (1778 – 1849), est, très jeune, chevalier de la Légion d’honneur, comme lieutenant de dragons, puis rejoint le régiment de son frère ; blessé à Friedland, il quitte l’armée, qu’il réintègre sous Louis-Philippe comme commandant de la citadelle d’Amiens. Il épouse la fille de François Richard-Lenoir, très grand manufacturier de l’Empire, décoré par le Premier Consul lui-même de sa propre croix en raison de l’installation de manufactures de coton dans le faubourg Saint-Antoine, donnant ainsi du travail à des milliers d’ouvriers.

Fils de Zénon, Richard (1816 – 1899) est colonel de gendarmerie sous le Second Empire, et reçoit la croix de la Légion d’honneur ; général au titre de l’armée provisoire en 1871, il rétablit l’ordre à Toulouse au printemps 1871, ce qui lui vaut la croix d’officier de l’Ordre.

Son fils Richard Joseph Édouard Charles (1856 – 1936) est saint-cyrien, officier de cavalerie légère et hussard. Il est obligé de quitter l’armée en 1904, avec la croix d’officier de la Légion d’honneur et le grade de chef d’escadron, en raison de blessures par chute de cheval. Une note de son dossier militaire, écrite par le général inspecteur de la cavalerie, illustre sa valeur : « le départ de M. le Commandant des Noëttes est une perte pour la cavalerie ». Dès lors, esprit curieux, il consacre sa vie à l’histoire des transports, et publie plusieurs ouvrages sur La Force motrice animale à travers les âges et sur L’Attelage, le cheval de selle à travers les âges, qui ont un grand retentissement comme contribution à la découverte des causes de la disparition de l’esclavage en Europe au Moyen Âge, puis sur l’histoire du gouvernail. Il épouse Jacqueline Vico, d’une ancienne famille corse, fille de Jacques Vico, sous-préfet du Second Empire et officier de la Légion d’honneur.

Leur fils, Richard Jacques Marie (1886 – 1918), est également officier de cavalerie, saint-cyrien, lieutenant de cuirassiers, tué à l’ennemi le 9 juin 1918 ; le centenaire de ce sacrifice a été commémoré par sa famille à Catenoy (Oise), sur sa sépulture. Chevalier de la Légion d’honneur à titre posthume et cité à l’ordre de l’armée, il porte la croix de guerre avec palme et étoiles de bronze. Il épouse Simone Cresson, dont le père André Cresson, professeur agrégé de philosophie, officier de la Légion d’honneur, a pour père Ernest Cresson, également officier de la Légion d’honneur, préfet de police pendant le siège de 1870-1871, bâtonnier de l’Ordre des avocats, et dont une rue perpétue le souvenir à Paris (XIVe).

Leur fils Richard André (1913 – 1994) est médecin militaire, sorti de l’École du service de santé des armées de Lyon. Il combat en juin 1940 sur la Somme, puis rejoint l’Algérie, sert comme médecin-lieutenant méhariste à El-Oued, puis intègre la 1re armée française, débarque en Provence et finit la guerre en Autriche ; il finit sa carrière comme médecin-colonel en 1959. Chevalier de la Légion d’honneur, il porte la croix de guerre avec étoiles de vermeil. Voici l’une de ses citations à l’ordre du corps d’armée, du 17 novembre 1944 : « Médecin d’un dévouement et d’un allant inégalable. Les 29 et 30 septembre et 1er octobre 1944, au cours des combats de la chapelle de Ronchamp et Recologne, sous des tirs d’artillerie et d’infanterie qui mirent hors de combat plusieurs brancardiers, a assuré jour et nuit, sur la ligne de feu, la relève et le transport de nombreux blessés, donnant à tous l’exemple d’une intrépidité et d’un sang-froid imperturbables » (signé : le général de corps d’armée de Goislard de Monsabert).

Il épouse en seconde noces Lily Roy, issue d’une vieille famille nantaise, et a de nombreux enfants, dont à nouveau deux médecins : Véronique (1954 ; AHH 864), médecin géronto-psychiatre et docteur en philosophie, chevalier de la Légion d’honneur, et Richard (1959), ancien interne des hôpitaux de Paris, chirurgien.

Armes du général comte Charles Lefebvre Desnouëttes : écartelé, au premier d’azur à une épée haute d’argent montée d’or (signe des comtes militaires), au deuxième d’argent au lion de sable armé et lampassé de gueules portant un étendard du même, au troisième de sable à un pin d’or surmonté d’une étoile du même et senestré d’un lion d’argent rampant contre le fût, au quatrième de sinople au cor de chasse d’or enfilé d’un badelaire haut d’argent monté d’or posé en bande.