Enoch

Cette famille allemande vend et édite des partitions musicales depuis le xixe siècle. Carl (1805 – 1883) représentait à Francfort-sur-le-Main (Hesse) les éditions de musique Meyer et Litolff de Brunswick (Basse-Saxe). Avec son épouse et ses deux fils, il s’installa en 1853 à Paris pour y fonder ses propres Éditions musicales Enoch, auxquelles il adjoignit précocement sa famille. Il s’associa ensuite ses deux fils en 1874 sous la raison sociale Enoch père et fils, avant de se retirer lui-même en 1880. Les deux frères s’associèrent alors Georges Costallat sous la raison Enoch frères et Costallat, puis continuèrent seuls à dater de 1895 sous la raison toujours actuelle Enoch et compagnie.

Le cadet, Charles, avait ouvert en 1867 une filiale à Londres, Enoch and Sons, active jusqu’en 1927. L’aîné, Wilhelm (1840 – 1913), développa la maison mère française en lui fixant une ligne éditoriale qui perdure toujours : un éclectisme associant musique savante, légère et populaire (œuvres symphoniques ou religieuses de César Franck, Emmanuel Chabrier, Maurice Ravel ou Georges Enesco, opérettes d’André Messager, chansons de Paul Delmet…) et musicologie (Émile Tavan ou André Gedalge). Avec d’autres éditeurs musicaux, il fit condamner en 1905 les industriels de la phonographie à verser des droits d’auteurs sur leurs ventes. Il obtint le grand prix des expositions universelles de Paris en 1900 et de Saint-Louis en 1904, et devint en 1906 le premier des trois chevaliers de la Légion d’honneur qui devaient se succéder au xxe siècle.

En 1910 lui succédèrent ses deux fils, Daniel (1872 – 1943) et Georges (1876 – 1951), qui publièrent des œuvres savantes de Moritz Moszkowski ou de Gustave Goublier aussi bien que des œuvres populaires de Louis Ganne ou de Francis Poulenc, ainsi que des recueils pédagogiques. Mais la Seconde Guerre mondiale interrompit leur activité, et en tant que juifs, Daniel et son épouse furent déportés et exterminés en 1943 à Auschwitz-Birkenau.

Fils de Daniel et nommé chevalier de la Légion d’honneur comme lui, Jacques (1900 – 1990 ; AHH 231), réfugié en Savoie pendant la guerre, reprit la maison d’édition familiale en 1944. Il publia Joseph Kosma ou Darius Milhaud, mais élargit aussi son catalogue à la variété et aux musiques de films. Il présida la SACEM à plusieurs reprises entre 1959 et 1968, et en resta président d’honneur. Sa veuve Janine (1921 – 2017 ; AHH 395) lui succéda en 1990 et édita notamment des œuvres françaises du début du xxe siècle (Emmanuel Chabrier, Antoine Mariotte). Elle transmit enfin en 2011 la maison Enoch et son catalogue de 1 700 titres à leur fille, Danièle Maillard (1947), jusqu’alors avocat à la cour d’appel de Paris.

Bulletin de l’AHH, n° 59, 2018.